Freud : « Le Moi est avant tout un Moi corporel, il n’est pas seulement un être de surface, mais il est lui-même la projection d’une surface ».
Qu’elle s ‘irrite qu’elle s’enflamme qu’elle s’infecte ou encore qu’elle perde sa couleur, notre peau nous raconte, raconte notre vécu notre histoire, nos joies (avec les rides d’expressions) nos colères (avec les rides de lion) et nos souffrances aussi, avec toutes les maladies de peau qu’on classe dans cette catégories de maladies psychosomatiques, tel que le psoriasis ou encore ce que les spécialistes appellent communément la névrodermite ou la dermatose quand la peau souffre d’une névrose .. comme si elle était un personne à part entière .. on dit plus qu’une telle personne est névrosée, mais sa peau l’est aussi !
Les manifestations de lésions ou de quelconques signes ou poussées épidermiques deviennent « symptôme ».
Symptôme de conversion d’une peau qui souffre certes, mais surtout d’une psyché qui a mal, mais faute de mots, elle n’a trouvé que cette issu pour exprimer ces maux.
Je vais partager avec vous une petite vignette clinique qui illustrerait parfaitement ce que j’avance.
Il s’agit d’une jeune femme de 30 ans orientée par son médecin traitant suite à une dépression qu’elle traite depuis une dizaine d’année .. elle avait consulté plusieurs spécialistes du plus conventionnel ( psychiatres ) au plus excentriques ( tror9iya machin)
Mais sans amélioration notable.
On appellera cette jeune femme Fatma ;
Fatma se plaignait d’être toujours d’humeur morose « je me sens triste me dit elle mais je ne sais pas pourquoi et elle ajouta qu’à part les médecins qu’elle rencontre, personne dans son entourage n’est au courant de ce qu’elle éprouve »
Fatma savait qu’elle était mal.. elle en était consciente mais de quoi ? elle n’en savait guerre.
oui .. il y avait quelque chose d’innommable.
Fatma me confie après quelques séances ; qu’elle développait une maladie de peau qu’il l’a complexée mais réussissait à camoufler jusque là.
Elle me dit je cite « j’ai des lésions ou des taches je ne sais pas comment on appelle ça ce blanc, y’a pas de couleur, j’ai consulté beaucoup de dermatologues et y’a pas de traitement j’ai peur de devenir « mba9 3a » tachetée toute blanche sans couleur sans vie »
Au cours de la thérapie et durant une année et à un rythme assez soutenu, Fatma a pu faire le lien entre l’apparition de ses taches blanches et le début de sa dépression.
En effet elle avait perdu son père à l’âge de 20 ans et elle ne souvient pratiquement pas ou rarement des fois où elle à pleuré la mort de son père ou l’absence de ce dernier .
Un père décrit comme fort de personnalité qui ne montrai pas ce qu’il pensait ou ce qu’il ressentait .. « même sur son lit de mort me confie t elle ; il était souriant il est parti en silence.. »
Elle était l’aînée d’une fratrie de 3 enfants à la mort de son père on lui a surtout dit qu’elle devait être une alliée pour sa mère qu’elle devait être forte « matebkich 3ayech benti to bouk yet7aer fi 9abrou » Fatma a assuré et elle a commencé a travailler et à être dans ce rôle qu’on lui a attribué et qu’elle n’a pas choisi.
Un rôle qu’il lui allait comme un gant vu qu’elle s’identifiait beaucoup à son père
Etre forte ne montrant rien, souffrir en silence .. assurer .. ramener de l’argent .. afficher un grand sourie malgré tout « je disais et dis toujours Hamdoulah avec un grand sourire »
Il est vrai qu’en Tunisie on a une croyance socio culturelle inculquée depuis des décennies et qui « quoi qu’il nous arrive .. de mal ou de bien, il faut remercier dieu, il faut dire hamdoulah … c’est le sort que Dieu nous a réservé et nul n’a le droit de contester.
Mais cette croyance qui fait parti nos us et coutumes et de nos mœurs devient pour Fatma un fardeau, un poids énorme qu’elle porte sur ses épaules. Devient un poids qu’il l’alourdie et qui surtout l’empêche de parler, de dire ..
Mais autant Fatma est restée muette immuable; son corps, sa peau en l’occurrence ne s’est pas tue, et a tellement parlé qu’après des eczémas à répétions elle développe un vitiligo.
En effet la peau parle, la peau reçoit, la peau transmet. La peau vibre et la peau vit, la peau reflète nos émotions et dit bien des choses à notre place.
C’est ce que Didier Anzieu psychanalyste nous explique dans son œuvre “Le Moi-Peau” en 1974, date à laquelle la psychanalyse a commencé à s’associer à la dermatologie. Il avance que comme la peau qui est une enveloppe qui protège le corps des agression extérieures ; « le moi » se trouva en difficulté, dépassant son seuil de tolérance et d’adaptation, se confronte alors à une effraction aussi bien psychique que physique et la peau en parallèle à notre moi, se voit perdre sa vitalité ou encore comme dans ce cas perdre sa couleur.
le Moi-peau fonctionne comme une interface : notre pensée se construit comme une enveloppe et la peau est influencée par cette enveloppe. Trop rigide, elle étouffera le Moi; Trop souple, le Moi manquera de consistance. La maladie de la peau exprime mais subit aussi les états du Moi.
Fatma n’a pas parlé .. fatma n’a pas pleuré la mort de son père et le deuil s’est figé, il s’est inscrit dans sa peau .. elle na pas parlé mais son MOI PEAU si.
La thérapie de Fatma n’est pas encore achevée mais les poussées des lésions ont connues un frein spéculaire.
Maintenant c’est elle qui mets des mots et des larmes aussi sur ce qu’elle ressent, ce qu’elle vit, et non sa peau.
La peau est donc un organe qui a sa propre vie, qui existe pour son propre compte, mais qui est visible. Et c’est un organe avec lequel je vais entrer en contact avec l’autre, parce qu’on se sert la main, parce qu’on se fait la bise, parce qu’on a des rapports plus intimes, dans le début du développement ou après dans la vie d’adulte. La peau c’est l’organe de l’enveloppe, du contact avec les autres, et aussi de la séparation, de ce qui fait la limite du corps..
La peau exprime parfois quelque chose qu’on ne sait pas encore, une relation qui se passe mal en particulier. La personne va d’abord avoir des signaux de sa peau, et se rendre compte après qu’il y avait quelque chose de psychique en cours.
La peau peut être en avance, pas forcément dans la même chronologie, le même tempo, elle peut par exemple lâcher prise après. Des patients déclenchent un psoriasis, après une rupture douloureuse. Ou au contraire, la peau tient, ne pose pas de problème. Ils souffrent, ils tiennent dans une situation de stress, d’inquiétude majeure. Et lorsque la situation s’arrête, typiquement un décès, alors la peau décompense. Elle lâche et déclenche une maladie qui peut être très invalidante.